Histoire Générale de la BD

de la BD des Auteurs

Les Années foisonnantes

Pilote. 1970

Si, Les journaux Spirou, Tintin, Pilote, et Vaillant devenu Pif Gadget continuent à exister, on verra surtout éclater une nouvelle production de BD adulte par le biais de nouvelles revues, dont une générée par scission avec Pilote.
Les années 1970 sont, en BD, le temps de la découverte et de l'exploration de nouveaux styles graphiques et narratifs.
La contre-culture naît au tournant des années 1960 et 1970.
Elle se cristallise dans Pilote.
On a une opposition entre les « acteurs de la jeune garde » et les figures du classicisme incarnée par Goscinny.
À la fin des années 1960 des magazines se lancent dans la bande dessinée pour « adulte » avec Charlie Mensuel (1969), Actuel.
Dans un mouvement de libération générale des mœurs et de renversements des interdits, Bretécher, Gotlib et Mandryka fondent L’Echo des savanes puis Gotlib part pour créer Fluide Glacial.
Elle est considérée comme la première revue de nouvelle génération.
Puis en 1975, dans le domaine plus de la science-fiction, Métal Hurlant (Druillet, Moebius, Farkas, Dionnet) s’impose.
À la fin des années 1970, le mouvement devient aussi commercial, encouragé par les éditeurs.
Puis, la contre-culture passe de mode.
Naissent les catalogues adultes des presses spécialisées et notamment avec les éditions Dargaud, en avance sur les autres.
Par la suite des catalogues sont créés sur la base d’auteurs des magazines à succès comme Métal Hurlant ou encore Fluide Glacial.
Quelques éditeurs d'aujourd'hui continuent par ailleurs de vivre sur ces acquis, comme Les Humanoïdes Associés (créé par des auteurs de BD, à la fin des années 1970).
Leur catalogue actuel reste fort influencé par des auteurs de ces années (Jodorowsky, Moebius pour ne citer qu'eux).
Les magazines emblématiques de cette époque sont :

Hara-Kiri. Hara-Kiri

Hara-Kiri est un magazine, créé en 1960 par une équipe dont les principaux animateurs étaient François Cavanna et Georget Bernier dit « professeur Choron ».
Ce journal satirique au ton cynique, parfois grivois, bénéficia d'un soutien télévisé discret de la part du réalisateur Jean-Christophe Averty (dont l'émission Les Raisins verts participait du même esprit) et connut un succès relativement important en France, à l'histoire riche en publicités radiophoniques provocantes (« Si vous ne pouvez pas l’acheter, volez-le ») et entrecoupée de quelques interdictions.
Le magazine est d'abord vendu par colportage sur les trottoirs pour arriver dans les kiosques à la fin de la même année.
Une lettre irritée arrive un jour au courrier des lecteurs, qui dit en substance :
« Vous êtes bêtes. Et non seulement vous êtes bêtes, mais vous êtes méchants. »
Le sous-titre du magazine est immédiatement adopté :
« Hara-Kiri, journal bête et méchant ».
Dans chaque numéro, le « professeur Choron » proposera le jeu bête et méchant du mois.
Hara-Kiri a principalement paru sous forme de mensuel, mais il a également connu, de 1969 à 1970 et en 1993,
une version hebdomadaire.
Les différentes incarnations du journal ont plusieurs fois subi les foudres de la censure ; c'est l'interdiction de la version hebdomadaire qui a abouti à la naissance de Charlie Hebdo, qui continue toujours... vaille que vaille.
Charlie Hebdo est un journal hebdomadaire satirique français fondé en 1970 par François Cavanna et le professeur Choron.
Il fait une large place aux illustrations, notamment aux caricatures politiques, et il pratique aussi le journalisme d'investigation en publiant des reportages à l'étranger ou sur les domaines les plus divers :
les sectes, les religions, l'extrême droite, l'islamisme, la politique, la culture.
Le journal paraît tous les mercredis. Il a publié également des hors-séries à périodicité variable.
Une première période de 1970 à 1981, puis de 1992 à aujourd'hui, avec l'idée tout est sujet à caricature... silence...

Charlie mensuel. Charlie Mensuel

Fondé en 1969 par Delfeil de Ton qui est son premier rédacteur en chef.
Son sous-titre est « Journal plein d'humour et de bandes dessinées ».
Le journal est, à ses débuts, directement inspiré par le mensuel italien de bande dessinée Linus, dont il reprend la mise en page et une partie des séries.
Il tire son titre, comme son modèle italien, de l'un des personnages principaux des Peanuts, en l'occurrence Charlie Brown.
La revue publie des comic strips classiques (Krazy Kat, Andy Capp) et contemporains (Bristow, les Peanuts, Buck Ryan, Mafalda, etc.) et des bandes dessinées européennes (Georges Pichard, Wolinski, Masse, Guido Crepax, Guido Buzzelli, Max Cabanes, etc.), notamment des séries italiennes traduites de Linus.
Jacques Glénat y fait ses débuts en tant que chroniqueur.
De 1977 à 1981, Jean-Patrick Manchette y tient des chroniques de romans policiers sous le pseudonyme de Shuto Headline.
Il a plusieurs rédacteurs en chef, dont Wolinski de 1970 à 1981, et Willem pour les derniers numéros de 1981 (n°146 à 152), année de la fin de sa première parution.
Wolinski lui trouve un slogan qui accompagnera quelque temps les formulaires d'abonnement
Journal qu'on lit sur un divan en croquant du chocolat ainsi que Charlie.
Le seul journal de bandes dessinées lu par des gens capables de lire autre chose que des bandes dessinées.
En 1970, il est doublé de Charlie Hebdo, successeur de Hara-Kiri hebdo à la suite de l'interdiction de ce dernier.
Charlie Mensuel cesse sa parution une première fois en septembre 1981.
Il reparaît en avril 1982, ayant été racheté par les éditions Dargaud :
le rédacteur en chef est Mandryka (du n°1 au n°16), jusqu'en juillet 1983, avec Philippe Mellot secrétaire général de la rédaction.
Ce dernier devient rédacteur en chef (du n°17 au n°45) jusqu'à la fin de la parution en février 1986.
En mars 1986, le magazine fusionne avec Pilote et devient Pilote et Charlie, dont Philippe Mellot reprendra la fonction de rédacteur en chef, jusqu'à la dernière parution du journal en 1988.

L'écho des savanes. L’Écho des savanes

L’Écho des savanes est une revue de bande dessinée créée en mai 1972 par Claire Bretécher, Marcel Gotlib et Nikita Mandryka, auteurs issus de Pilote.
Grâce à la renommée de ses fondateurs, le magazine est souvent perçu comme celui qui a permis qu'en France « la bande dessinée accède enfin à l'âge adulte », bien que Hara-Kiri et Charlie Mensuel aient ouvert la voie.
Reprise après une première cessation de parution en 1982 par les éditions Albin Michel, elle devient un magazine d'actualité et d'érotisme avec quelques pages de bande dessinée.
En 2006, cette nouvelle formule cesse de paraître, et ce sont les éditions Glénat qui relancent en 2008 la revue, en l'axant sur la bande dessinée et la société.

Fluide glacial. Fluide glacial

Fluide glacial est un périodique de bande dessinée française humoristique mensuel dans lequel sont ou ont été publiées plusieurs séries du neuvième art comme Jean-Claude Tergal, Les Bidochon, Superdupont, Gai-Luron, Sœur Marie-Thérèse des Batignolles, Carmen Cru, Lucien, Litteul Kévin ou encore Georges et Louis romanciers.
Fondé le 1er avril 1975 par les dessinateurs Gotlib, Alexis et par Jacques Diament, Fluide glacial est un magazine où l'humour en question (l'« umour ») est généralement bon enfant, libéré sans être provocateur, libertaire sans être forcément politique, mais aussi décalé.
La publication tire son nom d'un article de farces et attrapes (ampoule de verre qui, une fois brisée libère un liquide que l'on peut répandre sur un siège pour glacer le postérieur de celui qui s'assied dessus).
Il se démarque de l'humour franco-belge par l'influence d'Harvey Kurtzman, des Monty Python ou de Tex Avery.
Le magazine est publié par les éditions AUDIE (« Amusement Umour Dérision Ilarité Et toutes ces sortes de choses »).

Metal Hurlant. Métal hurlant (Les Humanos)

Métal Hurlant est un magazine français de bande dessinée de science-fiction qui a été édité par Les Humanoïdes associés de janvier 1975 à juillet 1987, puis de juillet 2002 à octobre 2004, avec un ultime numéro en 2006.
Créé sous l'impulsion de Jean-Pierre Dionnet, son rédacteur en chef de 1975 à 1985, Métal hurlant apparaît comme une des revues majeures de la presse adulte, un véritable laboratoire d'où sont sortis quelques chefs-d'œuvre et un bon nombre de grands noms de la bande dessinée contemporaine.
La revue de bande dessinée américaine Heavy Metal, dont le premier numéro est paru en avril 1977, est à l'origine une version américaine de Métal hurlant, bien que l'équipe rédactionnelle française n'y ait jamais été directement impliquée.
Heavy Metal a directement inspiré deux films : Métal hurlant (Heavy Metal, 1981) et Heavy Metal 2000 (1999) ainsi qu'une série télévisée :
Metal Hurlant Chronicles (2012). Métal hurlant, quant à lui, a inspiré directement ou indirectement l’esthétique de nombreuses œuvres graphiques, littéraires ou cinématographiques (Mad Max, Alien, Blade Runner, Le Cinquième Élément, etc.). ou encore (À suivre) des éditions Casterman.
Les nouveaux styles de ces années là définissent pour certains éditeurs leur ligne éditoriale.
Les éditeurs de BD ont d'ailleurs pour la plupart une ligne éditoriale ou plusieurs. Cela signifie que les directeurs de collection définissent le style de dessin et le genre d'histoire qu'ils souhaitent publier, et cela à travers différentes collections.
Les années 70 voient l'apparition des premières héroïnes dans la foulée de l'érotique Barbarella en avec les séries Natacha de François Walthéry, Yoko Tsuno de Roger Leloup et Laureline la complice de Valérian dans la série de Pierre Christin et Jean-Claude Mézières.

1980

(A suivre). A-suivre, La revue type des années 80

(A suivre) est un magazine au format mensuel, publié par Casterman entre 1978 et 1997, destiné à un public adulte à la ligne éditoriale classieuse.
Son rédacteur en chef, Jean-Paul Mougin, disait de ce projet :
« (A Suivre) sera l’irruption sauvage de la bande dessinée dans la littérature », affichant une volonté de donner à la bande dessinée ses lettres de noblesse, de laisser une liberté totale à ses collaborateurs pour explorer leurs univers.
Ce magazine marque l’apparition, ou au moins le développement, d’une bande dessinée dite « d’auteur », caractérisée par de nouvelles ambitions graphiques, une nouvelle esthétique, plus sombre, cultivant une certaine étrangeté.
Bon nombre de grands noms de la bande dessinée française des années 1980 y font leurs premiers pas, à l'instar de Tardi, tandis que d'autres, comme Manara, en profitent pour changer de public.
Dans les années 1970 ils ne sont pas les premiers sur le marché de la bande dessinée adulte, et se lancent après des revues bien installées telles que Pilote, L’Echo des savanes, Fluide Glacial ou encore Métal Hurlant.
L’équipe à l’origine d’(A Suivre) met en avant une autre manière de créer la bande dessinée, qui est en premier lieu caractérisée par les grands romans en bande dessinée.
La formule de base suivie comprend les chapitres de diverses bandes dessinées en format long, une partie rédactionnelle, puis des bandes de format court.
Les années 1980 voient l'apparition de nouveaux éditeurs, futurs grands de l'édition :
Soleil Productions, éditeur toulonnais qui a connu un fort succès avec l'univers du Monde de Troy Delcourt lancé par Guy Delcourt en 1986.
Certains éditeurs ont des lignes éditoriales très larges, de multiples collections, s'autorisant tous les genres et toutes les expériences alors que d'autres éditeurs ont des lignes beaucoup plus ciblées, et souvent basées sur une série à gros succès.
Ligne éditoriale basée sur le fantastique et l'aventure :
Éditions Soleil : fantasy (axée sur le succès de la série Lanfeust de Troy et son univers), aventure, science-fiction
Éditions Delcourt : science-fiction (Collection Neopolis), fantasy (Collection terre de légendes)
Éditions les Humanoïdes Associés : science-fiction (axée sur l'univers de l'Incal), fantasy
Ligne éditoriale basée sur l'humour :
Éditions Dupuis : axée essentiellement sur l'héritage de grandes séries à succès (Spirou et le petit Spirou, les Schtroumpfs, Gaston Lagaffe, etc.)
Éditions Glénat : grâce au succès de Titeuf
Ligne éditoriale basée sur le policier :
Éditions Glénat
Parfois les dessins animés sont aussi utilisés pour créer des bandes dessinées. Pour cela, on utilise des images extraites du dessin animé que l’on met en page, et sur lesquelles on rajoute le dialogue.
Mais cela reste une pratique encore assez rare en bande dessinée franco-belge.
Parallèlement aux bandes dessinées, on peut trouver des recueils d'illustrations, en général en couleur, d'images originales, qui incluent parfois des histoires courtes.
On parle alors d'art-book par analogie avec ce qui se fait aux États-Unis.

la BD érotique

Fritz the Cat, Crumb. Le sexe, à la fin des années 60, devient un sujet central de la BD.
Il n'est plus simplement la touche sexy, portée par des héroines comme Betty Boop , Dragon lady, et Wonder Woman... mais le thème au coeur de l'ouvrage, par son dessin et son histoire, qui sera tantôt érotique, tantôt pornographique. Le sujet est quand même largement abordé par Hara-Kiri, mais pas sous forme de BD.
Robert Crumb se révèle au monde entier avec Fritz the Cat, souvent considéré comme la première bande dessinée érotique.
Certains iront même jusqu’à l’affubler de pornographie.
Le style de Crumb est très proche de l’underground, au dessin non soigné et aux propos très directs.
Les scenarii de Fritz the Cat parlent de tout et de rien, avec un érotisme toujours présent et sans détour.
Le graphisme cru rend le propos plus violent que sensuel et le comic aura fait couler beaucoup d’encre.
Dans la veine de Crumb, Ralf Köning prend le parti d’insérer le sexe dans la vie quotidienne de ses personnages.
Tous ces albums ont le point commun de narrer la vie d’un couple gay, Conrad et Paul.
Le sexe est au cœur des problèmes du couple et le dessin humoristique rend le propos plus familier qu’érotique.
Pourtant les connotations sexuelles n’ont rien d’insinué.

Barbarella, Jean-Claude Forest. En europe, elle en appelle plus aux sens, à l’évocation voire à l’esthétisme.
En fer de lance, on pourrait citer deux auteurs majeurs, Jean-Claude Forest et Paolo Serpieri.
Au début des années 60, Jean-Claude Forest crée l’incontournable Barbarella, une héroïne à la plastique inspirée de celle de Brigitte Bardot.
On est loin de l’agressivité et du scabreux de Crumb.
Ici, le leitmotiv est l’érotisme dans sa définition la plus commune : titiller les sens du lecteur.
Pour cela Jean-Claude Forest use d’un stratagème mainte fois répété par la suite, qui donne la part belle au graphisme ultra-réaliste et place l’héroïne dans une histoire teintée de science-fiction, suffisamment coupée de la réalité quotidienne pour laisser cours à tous les fantasmes. Le succès est garanti.
Valentina, Guido Crepax. Moins science-fiction que fantastique, Valentina de l’italien Guido Crepax tend quelque peu vers les mêmes aspirations que Barbarella.
Cette fois la brune Valentina, photographe de profession, ne parcourt pas l’espace mais un monde plus réel, teinté de personnages aux pouvoirs spéciaux.
Créée en 1965, cette bande dessinée restera longtemps une référence dans l’érotisme.
Les années 70-80 vont connaître l’âge d’or de la bande dessinée érotique en se basant souvent sur ces deux “écoles”.
La première répond plus à des attentes d’humour salace, l’autre en revanche surfe sur la mouvance de la liberté sexuelle, grande revendication de l’époque et sur la vague de la science-fiction.
Ce sont également les années de “naissance” de la bande dessinée dite “pour adultes”, où il n’est plus étrange de créer des albums que les enfants ne pourront pas lire.
Tous ces paramètres favorisent la bande dessinée érotique, de bonne comme de mauvaise facture.
A la suite de Jean-Claude Forest, de nombreux auteurs vont mélanger sexe, science-fiction et hyperréalisme, tel que le préconisent Serpieri et sa Druuna.
Druuna, Serpieri. Cette brune pulpeuse aux atouts indiscutables, lutte contre les méchants, telle Xéna la guerrière. Chez Serpieri, mais encore bien plus chez les autres, le scénario n’est qu’un prétexte à la présentation de plastique toujours plus érotisante.
Il n’y a pas beaucoup de sensibilité ni de subtilité, mais ce n’est pas le propos.
Plus récemment, Milo Manara est devenu l’incontournable de la bande dessinée érotique.
Il a repris les bons vieux tuyaux de ces maîtres tout en laissant la science-fiction légèrement passée de mode.
Il y injecte un peu plus de sensibilité, plus prompte à l’érotisme qu’à la pornographie.
Peut être est-ce pour cela qu’il est actuellement le seul survivant ?
Le début des années 90 ont marqué un grand coup d’arrêt de la production de bande dessinée érotique.

Texte © Wikipédia

Les comics US et alternatifs


Amazing Spider-Man n°121, 1973. L'âge de Bronze

Parmi les dates le plus souvent retenues pour marquer le début de l'« âge de bronze » on trouve celle de mai-juillet 1971 qui correspond à trois numéros de Amazing Spider-Man publiés sans le sceau du Comics Code, afin de pouvoir évoquer les dangers de la drogue.
Cette initiative conduit à adopter une réécriture du Comics Code, qui autorise désormais la mention de drogues si celles-ci sont présentées sous un aspect négatif.
Une autre date proposée parfois comme instaurant l'« âge de bronze » est celle de l'arrivée de Jack Kirby chez DC où il crée, seul, Le Quatrième Monde.
Enfin une dernière date est parfois préférée.
C'est celle de juin 1973 car cette année-là Gwen Stacy, la fiancée de Peter Parker meurt dans le no 121 de The Amazing Spider-Man. Ce décès ancre le monde des super-héros dans la réalité car, dorénavant, des évènements importants peuvent survenir qui changent la vie des personnages.
L'une des caractéristiques de cet « âge de bronze » est en effet le réalisme qui s'impose.
Cette évolution du contenu des comics est à mettre en relation avec les changements de la société américaine.
Ainsi, les super-héros venant des minorités ethniques, bien qu'ils existent depuis un certain temps déjà, sont plus nombreux et mieux mis en valeur.
La remise en cause de l'autorité se reflète dans les comics :
Captain America change de nom pour devenir Nomad après la découverte d'un scandale semblable à celui du Watergate et Green Lantern s'allie à Green Arrow pour un voyage dans une Amérique raciste, sexiste et destructrice de la nature.
Le monde des comics est alors plus complexe et plus sombre.
portrait photographique de Chris Claremont Chris Claremont, scénariste qui fit des X-Men une série à succès. Les ventes de comics durant cette période diminuent mais certaines séries résistent, comme Superman ou Batman, qui bénéficient d'une base de lecteurs fidèles.
De nouvelles séries s'imposent car elles bénéficient de la présence de jeunes auteurs talentueux. C'est le cas des X-Men de Chris Claremont et John Byrne, recréés en 1975.
Ils font partie de la nouvelle vague d'auteurs qui arrivent dans les années 1970 parmi lesquels on trouve notamment comme scénaristes Dennis O'Neil, Len Wein, Marv Wolfman, et comme dessinateurs Dave Cockrum, Michael Wm. Kaluta, Jim Starlin, etc.

De nouveaux genres

Dans les années 1970, de nouveaux genres apparaissent sur les stands comme l'heroic fantasy, l'horreur ou le kung fu.
L'heroïc fantasy est représentée par des titres comme Conan de Roy Thomas et Barry Windsor-Smith édité par Marvel.
Les comics d'horreur, autorisés après la refonte du Comics Code sont incarnés chez Marvel par Tomb of Dracula et, chez DC, par House of Secrets dans lequel apparaît Swamp Thing.
Enfin on trouve aussi des comics mettant en scène des personnages maîtres du kung fu comme Shang-Chi créé par Steve Englehart et Jim Starlin, pour Marvel, en décembre 1973.
Les années 1970 marquent aussi l'apparition du premier crossover entre deux maisons d'édition.
En 1975, DC et Marvel publient conjointement une adaptation du Magicien d'Oz et l'année d'après elles publient une aventure mettant en présence Superman et Spider-Man. Ce type de rencontres se renouvelle souvent par la suite.

Les débuts de l'édition alternative

Les comics underground pendant ce temps connaissent une crise, à l'image de la société américaine dans son ensemble.
La contestation s'essouffle et la bande dessinée underground perd son lectorat.
Les auteurs eux-mêmes ne se limitent plus à une bande dessinée contestataire et ils vont plutôt produire des œuvres personnelles dont ils restent propriétaires.
Ils adoptent de nouveaux lieux de diffusion avec les magasins spécialisés dans la vente de comics.
De nouveaux éditeurs indépendants voient alors le jour, car ils peuvent trouver des lecteurs sans être gênés par des problèmes de distribution.
Parmi ces éditeurs on trouve Pacific Comics qui est le premier éditeur à proposer des comics accessibles uniquement dans les magasins spécialisés, mais aussi Kitchen Sink Press, NBM Publishing, Eclipse Comics, etc.
A contrario, des éditeurs existant depuis les années 1930 disparaissent, ne parvenant pas à s'adapter à tous ces changements. Ainsi Dell disparaît en 1973, Gold Key en 1984.
Des éditeurs plus jeunes subissent le même sort comme Warren Publishing en 1983.
Le passage de l'underground à l'alternatif commence dès 1976 quand Harvey Pekar convainc Robert Crumb de mettre en image son scénario autobiographique.
L'année suivante, Dave Sim commence à publier Cerebus the Aardvark, un comics qui commence comme une parodie de Conan mais permet à l'auteur de présenter ses opinions philosophiques.
Cette œuvre est auto-éditée et malgré son succès le restera jusqu'à sa fin au numéro 300 car Dave Sim désire garder le contrôle total sur son travail.
En 1978, c'est Wendy et Richard Pini qui commencent leur série Elfquest, elle aussi auto-éditée, qui connaîtra des tirages allant jusqu'à 100 000 exemplaires.
La création de la revue RAW par Art Spiegelman et son épouse Françoise Mouly en 1981 puis celle de Weirdo par Crumb sont deux autres étapes de ce glissement vers l'alternatif.
En effet ces deux auteurs underground vont dans leurs revues donner un espace à de jeunes créateurs indépendants.
Le passage de relais entre Robert Crumb et Peter Bagge à la tête de Weirdo marque cette mise en avant progressive de la jeune génération.
De nouveaux formats Durant ces années 1970 deux nouveaux formats sont créés :
la mini-série qui est un ensemble de comic books racontant une histoire complète en quelques numéros et le roman graphique (graphic novel) dans lequel on trouve une histoire complète.
La première mini-série, The World of Krypton, date de 1979 et est publiée par DC Comics L'origine du roman graphique est plus difficile à cerner, car plusieurs titres se disputent l'honneur d'être le premier publié sous cette forme.
En 1971, Archie Goodwin et Gil Kane produisent Blackmark un album de 119 pages qui rétrospectivement a été surnommé « le premier roman graphique américain ».
En 1976, sort Bloodstar de Richard Corben qui se définit comme roman graphique sur la couverture.
Enfin en 1978 est publié par Eclipse Comics, Sabre:
Slow Fade of an Endangered Species de Don McGregor et Paul Gulacy qui est le premier roman graphique destiné uniquement aux magasins spécialisés de comics.
Ce format se développe peu à peu et sert ensuite à désigner aussi des compilations d'épisodes de comics.
La question du droit d'auteur

Alors que l'auteur de bande dessinée était jusqu'alors considéré comme un employé qui devait donner ses planches de dessin à son éditeur qui avait tous les droits sur celles-ci, en 1973, DC Comics commence à rendre aux auteurs les planches originales des histoires publiés.
Puis les responsables décident d'accorder un petit pourcentage des bénéfices en cas de réimpression des comics et d'utilisation dans un autre média.
En 1976, Marvel suit l'exemple de DC.
En 1978, les lois sur le copyright changent et les éditeurs commencent à proposer de nouveaux contrats pour assurer les droits de propriété sur les créations des artistes.
Des oppositions entre les éditeurs et les auteurs vont surgir et c'est seulement en 1987 que le problème semble résolu bien que régulièrement encore des procédures judiciaires soient entamées par exemple le procès de la famille Kirby contre Marvel achevé en juillet 2011 (dans l'attente d'un procès en appel).

depuis 1985, Âge moderne des comics.

Les métamorphoses de l'écriture
Trois comics, tous publiés par DC Comics, sont généralement nommés comme point de départ de l'« âge moderne » de la bande dessinée américaine.
Il s'agit de Crisis on Infinite Earths de Marv Wolfman et George Perez, édité en 1985 et qui permet la recréation de l'univers DC.
Les origines des super-héros sont réécrites et adaptées au monde contemporain.
En 1986, deux autres mini-séries donnent le ton de cet âge moderne :
The Dark Knight Returns de Frank Miller et
Watchmen d'Alan Moore et Dave Gibbons.
Les thèmes sont plus adultes, puisque sont évoquées la sexualité et la drogue, et la violence est plus visible que dans un comics classique.
Swamp Thing d'Alan Moore, édité par DC, avait déjà montré la voie et n'était plus soumis au comics code depuis le numéro 29 d'octobre 1984.
Par la suite, ce type de récits se développe avec des comics tels que Hellblazer ou Sandman de Neil Gaiman.
D'ailleurs, à partir de 1987, ces comics portent sur leurs couvertures l'avertissement For Mature Readers.
Cela aboutit, en 1993, à la création d'une collection au sein de DC Comics nommée Vertigo.
Produire des contenus plus adultes n'est pas sans danger et, en 1986, des associations, des journalistes et des politiciens s'en prennent aux comics. Cela aboutit à la mise en place d'une classification par âge chez DC et par l'assurance, chez Marvel, que les règles du CCA sont bien observées.
Cela va aussi conduire à la mise en accusation d'un propriétaire de magasin de comics pour vente de produits pornographiques.
Il est innocenté en 1989 mais les menaces contre la liberté d'expression amènent la création, en 1987, du Comic Book Legal Defense Fond, organisme ayant pour but d'aider financièrement les personnes travaillant dans l'industrie du comics qui seraient poursuivies.
1986 est par ailleurs une date importante dans l'histoire des comics car cette année là paraît le premier tome de Maus (intitulé Maus: A Survivor's Tale) d'Art Spiegelman que celui-ci avait pré-publié dans sa revue RAW.
Le second tome Maus: from Mauschwitz to the Catskills vaut à l'auteur un prix Pulitzer spécial en 1992.

L'émergence de nouveaux artistes

Jusqu'au milieu des années 1980, le lectorat des comics s'érode et les ventes, peu à peu, diminuent mais celles-ci vont de nouveau augmenter grâce à la conjugaison de plusieurs éléments.
Tout d'abord une nouvelle génération d'artistes arrive et plus précisément chez Marvel Comics :
Todd McFarlane, Jim Lee, Rob Liefeld, Marc Silvestri, Jim Valentino, et quelques autres sont chargés de prendre en main des héros importants tels que les X-Men ou Spider man. Les ventes des séries s'envolent :
le premier numéro de Spider-Man par McFarlane se vend à trois millions d'exemplaires,
X-Force no 1 à cinq millions et
X-Men no 1 à huit millions.
De plus, une bulle spéculative se développe car des acheteurs font le pari d'une revente à un prix élevé de numéros exceptionnels (numéro 1, évènement marquant, etc.).
Les éditeurs profitent de cet engouement et l'encouragent en multipliant les séries et les numéros spéciaux.
Ils créent aussi des couvertures originales (embossage, découpes, encre phosphorescente, etc.) qui sont supposées donner de la valeur à n'importe quel comics.
De nouvelles maisons d'éditions vont tenter de suivre le mouvement :
Valiant Comics devient la troisième maison d'édition derrière Marvel et DCP alors que Image Comics, fondée en 1992 par les vedettes de Marvel (Rob Liefeld, Erik Larsen, Jim Valentino, Todd McFarlane, Marc Silvestri et Jim Lee), cherche à imposer de nouvelles séries de super-héros.

Texte © Wikipédia


Manga moderne

La Rose de Versaille, Riyoko Ikeda, 1972-73. 1970

Dans les années 1970, le manga pour filles, écrit par des femmes (shōjo) se développe à l'initiative du groupe de l'an 24, notamment Moto Hagio (Poe no ichizoku) et Keiko Takemiya (Kaze to ki no uta), puis de Riyoko Ikeda (La Rose de Versailles), Suzue Miuchi (Glass no Kamen), et Yumiko Igarashi et Kyoko Mizuki (Candy Candy).
Mettant en avant les relations psychologiques des personnages, il se détache des mangas pour garçons (shōnen). En 1985, Tezuka Osamu reçoit le prix culturel de Tokyo, et en 1990, un an après sa mort, le Musée d'art moderne de Tokyo lui consacre une exposition.
Cet événement marque l'introduction du manga dans l'histoire culturelle japonaise.

développement du système manga

Pendant les années 1960-1970 que le marché du manga tel que nous le connaissons aujourd’hui finit de se mettre en place.
C’est en 1955 qu’apparaissent les premières collections de bandes dessinées rééditant dans un format poche les séries prépubliées dans les magazines.
Il s’agit du format tankôbon, à peu près de la taille d’un livre de poche chez nous et d’environ 200 pages.
Le phénomène s’accélère au milieu des années 1960 et continue son développement durant les années 1970 à 1990, devenant ainsi le système standard de l’édition de bande dessinée :
La prépublication puis une édition reliée réservée aux séries à succès.
Il se développe alors au Japon un système de publication qui existe depuis très longtemps en France et en Belgique, qui va être abandonné petit à petit dans ces deux pays, jusqu’à la disparition d’une véritable prépublication reposant sur les périodiques dans les années 80.
Certes, la France n’a jamais été un grand pays consommateur de presse, à la différence du Japon.
De plus, la population japonaise représente presque du double de la population européenne francophone, ce qui a permis le développement d’un marché plus important, donc plus facilement viable.
Enfin, la télévision ne joue pas le même rôle au Japon qu’en France ou en Belgique car au lieu de réduire le public des lecteurs de bande dessinée, il l’amplifie.
En effet, dès le milieu des années 1950, le Japon voit apparaître des dessins animés nationaux, produits par des studios comme Tôei. En 1961, Tezuka Osamu fonde sa propre société de production, la Mushi Productions, qui adapte pour la télévision ses mangas les plus connus comme Le roi Léo et Astro, le petit robot.
Ainsi, il gagne une plus grande liberté pour réaliser ses œuvres car travailler pour Toei l’avait laissé très insatisfait sur ce point.
Grâce à l’énorme succès qu’il rencontre avec ses séries, y compris à l’exportation pour les versions animées, le manga est systématiquement adapté en dessins animés pour le petit écran.
En baissant énormément les standards de qualité de l’animation de l’époque pour les rendre compatible avec les coûts et les délais imposés par une diffusion télévisuelle, Tezuka révolutionne, là aussi, le monde du manga.
Cette fois, par le biais de l’animation.
Enfin, à la fin des années 1960, une autre révolution s’opère dans le manga avec l’apparition du gekiga, ce qui donnera par la suite naissance à une autre catégorie éditoriale :
le seinen.
En effet, les premiers magazines dédiés aux jeunes adultes (lycéens et étudiants) font leur apparition en 1967 pour se développer durant les années 1970.
C’est ainsi que le Manga Action Weekly de l’éditeur Futubasha et le magazine COM édité par Mushi Productions naissent en ciblant les 18-30 ans.
L’année d’après, c’est au tour du bimensuel Big Comic de Shôgakukan d’apparaître sur le marché.
La segmentation du public se fait de plus en plus précise, chaque publication cherchant à toucher tel ou tel lecteur (ou lectrice) en multipliant les revues à leur attention.

Les kashibonya, le gekiga et Garo

Mais revenons un peu en arrière. Conjointement au développement au début des années 1950 des akahon, ces mangas à petits prix et mal rémunérés, se situant à l’écart des histoires issues des revues ou journaux basés à Tokyo, regroupant la soi-disant élite des auteurs, une autre forme de diffusion du manga va se mettre en place. De nombreux dessinateurs trouvent une autre source de diffusion et de profits (même si leur travail est en général très mal payé) pour pouvoir exercer leur art.
Pour contourner le problème du coût d’achat trop élevé des mangas, même quand il s’agissait d’akahon ou d’une simple revue mensuelle, un réseau de librairie de prêt, les kashibonya, se développe à partir de la région d’Oosaka, atteignant même le nombre de 300 000 au milieu des années 1950.
Les éditeurs d’akahon se mettront par la suite à produire pour les kashibonya afin de se trouver un autre marché que celui, déclinant, du manga populaire à faible prix. Les librairies de prêt éditent donc leurs propres œuvres (kashibon manga), destinées non pas à être vendues mais louées.
Ainsi, toute une série d’auteurs majeurs vont venir de ce circuit de distribution.
C’est en 1957, en réaction aux mangas pour enfant et au style issu des séries de Tezuka Osamu, qu’un nouveau genre de bande dessinée fait son apparition.
Il s’agit du gekiga, terme inventé par Tatsumi Yoshihiro. Ce nouveau style ne connaîtra le succès qu’à partir de 1965.
Mais l’influence du gekiga sera énorme, jusqu’à faire évoluer profondément l’œuvre du «dieu du manga».
Ce nouveau genre de manga veut privilégier l’aventure ou dépeindre une certaine réalité de la société, celle de la rude vie des gens du peuple, en les dessinant dans style réaliste (et non pas comique comme dans les story manga, qui s’adressent aux enfants), tout en essayant d’éviter un trop grand manichéisme, notamment en ne cachant pas le côté sombre du personnage principal de l’histoire.
Le cinéma néoréaliste européen et le film noir américain, aussi bien au niveau des thèmes que de la narration, influencent énormément les auteurs de gekiga.
Ce mouvement nait donc au sein du circuit de distribution des librairies de prêt et va lancer nombre d’auteurs qui marqueront l’histoire du manga lorsqu’ils seront publiés par Garo ou par différents éditeurs plus traditionnels comme Shirato Shampei (Kamui Den), Tsuge Yoshiharu (L’homme sans talent) Tatsumi Yoshihiro (Daihakken) , Kojima Gôseki (Kozure Okami), Saito Takao (Golgo 13), Hirata Hiroshi (Satsuma).
Mais l’économie florissante du début des années 1960 porte un coup fatal au marché de la location de mangas, le public ayant les moyens de les acheter et non plus de les louer.
De ce fait, en 1963, les éditeurs fournissant les kashibonya ont pratiquement tous disparu alors que leurs meilleurs auteurs se retrouvent à publier dans les grands magazines comme le Shônen Magazine de Kôdansha.
Ce dernier leur a ouvert grandes ses portes afin de lutter contre ses concurrents qui avaient pris le dessus en terme de part de marché. Le résultat est une grande réussite commerciale pour l’éditeur.
Mais le refus d’un certain nombre d’auteurs de se plier aux contraintes d’une publication hebdomadaire dans une revue pour jeunes entraîne la création de Garo.
En effet, Shirato Shampei connaît le succès avec ses séries publiées dans le Weekly Shônen Magazine.
Mais il supporte assez mal de ne plus avoir la liberté qu’il avait connue avec les éditeurs du réseau de kashibonya.
C’est pour sa nouvelle série, Kamui Den, que Nagai Katsuichi, ancien membre des kashibonya de Tokyo devenu éditeur, crée Garo en 1964.
Pendant plus de trente ans, le magazine va permettre à de nombreux auteurs de débuter et de s’exprimer beaucoup plus librement qu’ils n’auraient pu le faire autrement, enrichissant ainsi considérablement le manga et même la bande dessinée mondiale.
C’est ainsi que nombreux styles ont pu cohabiter au sein de la revue comme le gekiga avec Shirato Shampei et Tatsumi Yoshihiro, le surréalisme et l’expérimentation avec Tsuge Yoshiharu, l’ero-guro avec Maruo Suehiro, l’heta-uma avec King Terry, etc.

La fin d’une époque

Malheureusement le réseau des kashibonya, le gekiga et Garo ont tous les trois disparu.
Le premier, comme nous l’avons déjà vu, dans la deuxième moitié des années 60. Cette forme de distribution (c’est à dire sans vente du produit même) des mangas est réapparue, avec les manga kissa, des cafés où on peut lire des mangas en libre service (ainsi qu’aller sur Internet, jouer à des jeux vidéos ou regarder des animés).
Ils ne font que reprendre le concept des kashibonya où on pouvait lire les titres sur place après avoir payé une certaine somme. Quand au gekiga, il a lentement disparu avec le temps, on ne trouve plus grand monde pour s’en réclamer.
Il faut dire que la disparition de son support privilégié, les kashibon manga puis Garo lui a porté un coup fatal.
Actuellement, il n’y a guère, parmi les auteurs d’importance, que Saito Takao, ainsi que Hirata Hiroshi, pour s’en réclamer, ce qu’on peut considéré comme étant plus une appelation marketing qu’une réalité éditoriale. A moins d’estimer que Leed Publishing, l’éditeur de ces deux auteurs, est le dernier bastion du genre.
Enfin, Garo a arrêté sa parution en 2002 après une longue agonie, le magazine ayant connu deux arrêts d’activité entre 1996 et 1997 et entre 1998 et 2000.
On était loin de 1971, l’année record qui avait vu le magazine tirer à 80 000 exemplaires.
Mais l’esprit d’avant-garde de Garo a pu subsister dans Ax, fondé par des personnes issues de ce qui reste une référence majeure dans l’histoire du manga.
On peut noter qu’il existe un autre magazine de référence dans le domaine de la bande dessinée alternative :
IKKI, un mensuel édité par Shôgakukan. Mais son tirage est assez faible (30 000 exemplaires), surtout comparé aux autres publications mangas de l’éditeur.
Comme on peut le voir, le manga «alternatif» est réellement un marché de niche au sein de la bande dessinée japonaise mais il permet à toute une série d’auteurs de s’exprimer plus librement, d’expérimenter et de créer à leur rythme même si, pour vivre, beaucoup réalisent des œuvres pour différents magazines seinen ou josei plus grand public.
En effet, rappelons que ces deux genres sont indirectement issus de Garo lorsque les éditeurs se sont aperçus qu’il y avait un marché pour une bande dessinée adulte.
De ce fait, il y a toujours eu des passerelles entre le manga «alternatif» et le manga pour les jeunes adultes.

Le développement du manga : Du grand public à la spécialisation et au marché de niche

Les années 1980 voient s’amplifier le développement commercial du manga sous toutes ses formes.
On assiste à une multiplication des créations de magazines, à leur segmentation de plus en plus précise.
C’est ainsi qu’au début des années 1980, on voit apparaître des périodiques à destination des jeunes femmes comme You, un mensuel de l’éditeur Shueisha qui tire actuellement à 230 000 exemplaires, ce qui en fait le plus important dans sa catégorie.
Cette politique de marchés ciblés fait qu’on peut trouver des magazines ne publiant, par exemple, que des séries sur le golf ou la cuisine. Toutes les niches commerciales sont exploitées, y compris celle du sexe.
Il y a le yaoi, un genre regroupant un type de publication issu du monde des mangas amateurs (les dôjinshi) spécialisé dans les histoires mettant en scène des relations homosexuelles masculines à destination d’un lectorat de jeunes filles.
Biblos était l’éditeur de référence du genre mais il a cessé ses activités en 2006 avec le dépôt de bilan de sa maison mère Hekitensha.
Il y a surtout une grande partie (en nombre de titres) de la production de manga qui relève du domaine que l’on peut appeler hentai ou ecchi, c’est-à-dire des mangas érotiques ou pornographiques à destination d’un lectorat masculin hétérosexuel.
A l’intérieur d’un même genre, les magazines vont même jusqu’à se spécialiser.
Par exemple, Comic LO est un magazine publié par Akaneshinsha qui se focalise sur les lolicon («lolita complex», un fantasme sur les adolescentes, voire les prépubères).
En Occident, un tel magazine serait interdit car il serait qualifié de pédophile alors qu’au Japon, c’est un genre établi qui compte plusieurs magazines spécialisés.
Autre exemple moins extrême avec le mensuel Men’s Young de l’éditeur Futabasha. Créé en 1995 lorsque le marché du manga était à son apogée, il a connu un arrêt en 2004 avant de reprendre dernièrement.
Son contenu est interdit au moins de 18 ans car certaines séries publiées sont clairement pornographiques.
Ces trois exemples illustrent bien que le sexe est aussi un marché de niche qu’il faut exploiter sous tous ses aspects.

Le développement du manga : Grandeur …

C’est dans les années 1980 que l’on voit apparaître des titres très vendeurs comme Dr Slump puis Dragonball de Toriyama Akira, Ranma ½ de Takahashi Rumiko, Chibi Maruko-chan de Sakura Momoko, etc.
Les mangas à succès sont déclinés sous toutes les formes de produits dérivés possibles :
Série d’animation télé plus ou moins à rallonge, longs métrages d’animation, OAV, Art book,[15] posters, jouets, jeux vidéo, albums musicaux, «goodies» de toutes sortes, marque de produits alimentaires, etc.
C’est pourquoi une adaptation en série d’animation télé est si importante pour les mangaka.
Une diffusion télévisuelle est l’assurance de voir les ventes de la série exploser et de permettre une déclinaison sous d’autres formes.
Sachant que l’auteur garde les droits d’exploitation sur les produits dérivés, ceux-ci font sa fortune, bien plus que ses œuvres proprement dites.
C’est une caractéristique du manga qui a fait son apparition dans les années 1960 mais qui atteint son apogée dans les années 1990 :
la commercialisation à outrance du manga sous toutes les formes possibles et imaginables.
Au Japon, la bande dessinée n’est pas un art, c’est un loisir que l’on commercialise parmi d’autres.
Tant que ça marche, on continue…
Et quand on parle «marché de consommation», on parle de tirages.
Si on regarde la courbe de ces derniers pour les magazines de mangas (les mangashi), on s’aperçoit qu’en quelques années, entre le début des années 1980 et celui des années 1990, de nombreux périodiques ont doublé leurs ventes. En 1994, le Weekly Shônen Jump est au sommet avec un peu moins de 6,5 millions d’exemplaires imprimés chaque semaine.
Mais il n’est pas le seul, tous les magazines réalisent leurs records à peu près à la même période avant de voir, pour la plupart, leurs ventes s’effondrer.

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